Transcendance

Deux écueils guettent ceux qui s’aventurent aux Transcendantes. Certains s’y déboutonnent, d’autres s’y assèchent. Dans sa brève note d’intention, Yoav Levanon demande qu’on ne le croie pas prisonnier de la seule illusion virtuose supposée par le titre. Ses Concertos de Liszt (voir ici), impeccables et pourtant habités, lui donnaient préalablement quitus : si son piano était demeuré le même, il saurait faire paraître les sous-textes des poèmes derrière le brio des Études.

D’ailleurs il ne renonce pas au spectaculaire, l’embrasement initial du Prélude le dit assez, mais ce ne sera pas pour briller, pour méduser plutôt car ce feu est noir, et les Fusées elles-mêmes plus soufre qu’artifice.

Le grand lied de Paysage dit soudain l’élan, la générosité, quelque chose d’italien, et il faut bien le dire un degré d’émotion sensible jusqu’à la limite qu’il ne faut pas franchir : le jeune homme surveille son art pour le hausser au niveau de vision voulu par Liszt. Mazeppa pourra déferler mais il se contiendra pourtant, comme il tiendra sa Wilde Jagd dans des éclats sataniques sans la pousser à l’hystérie.

Ce grand son si sombre, quelle signature, qui saura se teinter d’ombres pour Harmonies du soir, prière nocturne dont le recueillement très Chopin puis l’orage très Liszt rappellent ce qu’y faisait Claudio Arrau – écoutez seulement.

LE DISQUE DU JOUR

Franz Liszt (1811-1886)
Études d’exécution transcendante, S. 139

Yoav Levanon, piano

Un album du label Warner Classics 5021732835475
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Photo à la une : le pianiste Yoav Levanon – Photo : © DR