Surprise !, le disque s’ouvre sur l’Introduction et Polonaise brillante que Truls Mørk transforme en air d’opéra, avec cabalette : la Polonaise est irrésistible sous cet archet qui semble chanter de mots.

Louis Lortie chante tout autant que lui, et tirera les Variations, Op. 12 vers le ballet et le bel canto, les retirant du salon où tant de pianistes les auront confinées, toucher profond mais clavier leste, tout juste son Fazioli est-il un peu trop sonore pour atteindre à un raffinement des dolce supplémentaire, mais baste : écoutez la fantaisie joueuse de l’Opus 1, ce Rondeau d’un adolescent de quinze ans que Louis Lortie joue avec des impertinences de Chérubin.

D’autres chants s’invitent dans les deux cahiers de Mazurkas qui sont les musiques d’un autre monde, mais la nature du Fazioli leur refuse les sfumatos, le clavier terrestre les rend un rien trop uniment à la danse, l’éclairage est trop net pour la Mazurka en ut dièse mineur, mais comme cela chante ! Terrien, quasi Tatras, le Vivace de l’Opus 56 le sera, rendant les Mazurkas qui l’entourent plus étranges, fuyantes, émouvantes à force d’harmonies biaisées.

Retour de Truls Mørk, magnifiant la Sonate pour Franchomme, chantant et disant à la fois, rendant justice à l’une des partitions majeures des ultimes années de Chopin, trop souvent déconsidérée face aux ultimes chefs-d’œuvre ; d’abord pour cette interprétation éloquente, ce disque se révèle décidément indispensable.

LE DISQUE DU JOUR

Frédéric Chopin (1810-1849)
Polonaise brillante en ut majeur précédée d’une Introduction, Op. 3
Rondeau en ut mineur,
Op. 1
Variations brillantes en si bémol majeur, Op. 12
3 Mazurkas, Op. 50
3 Mazurkas, Op. 56
Sonate pour violoncelle et piano en sol mineur, Op. 65

Truls Mørk, violoncelle
Louis Lortie, piano

Un album du label Chandos CHAN 20361
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Photo à la une : le pianiste Louis Lortie – Photo : © DR