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Sa Patrie

L’écrire est terrible, mais condamné par son cancer, Jiří Bělohlávek aura transcendé son art : ses récents Dvořák, Symphonies, Concertos, Danses slaves (parmi les plus belles depuis Kubelík), Stabat Mater le disaient assez : revenu chez lui à Prague, enfin choisi en 2012 par les musiciens de la Philharmonie tchèque, il atteignait au but de sa vie : inscrire son art dans la filiation de ceux de Václav Talich et de Karel Ančerl, rien moins. On ne pouvait le lui contester depuis dix ans, et ce n’est pas un hasard si, au terme, paraît cette version granitique de Má Vlast patiemment enregistrée Salle Smetana du 12 au 14 mai 2014.

Granitique et narrative, un conte sombre dont les épisodes épiques se rassérènent dans des paysages aux détails ouvragés dès la harpe d’aède qui ouvre Vysehrad, où des personnages paraissent saisis dans toute la violence de leur mouvement – Sarka ! –, tout un théâtre d’images où paraît le récit national.

Mais derrière ces contes formidables emplis de bruits et de fureur, une amertume glaciale s’incarne dans l’identité sonore même de la Philharmonie Tchèque, quelque chose d’irrémédiable, de funèbre qui pleure éperdument dans la clarinette de Sarka. Magnifique désespoir d’un lyrisme terrible, tenu de si près par Jiří Bělohlávek, si surveillé, si intensément sculpté qu’en refermant l’album un souvenir me saisit : cette tension, ce geste épique, ces sonorités quasi mahlériennes, où les avais-je déjà entendues incarnées ainsi dans le chef-d’œuvre de Smetana ?

Chez Václav Smetáček, qui fut toujours l’auteur de ma version favorite. Bělohlávek le rejoint, autre héros de ce panthéon.

LE DISQUE DU JOUR

Bedřich Smetana (1824-1884)
Má Vlast (Ma patrie)

Orchestre Philharmonique Tchèque
Jiří Bělohlávek, direction

Un album du label Decca 4833187
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Photo à la une : © DR

L’âme aux cordes

Longtemps, je n’ai vécu qu’avec une version de la Sérénade pour cordes de Tchaikovski, celle justement qui referme le deuxième CD de ce coffret inespéré : en octobre 1964, pour la stéréophonie, Josef Vlach revenait à cette partition Continuer la lecture de L’âme aux cordes

Par les près et les bois de Bohème

On sait la passion de Sir Charles Mackerras pour Janáček et le travail de divulgation qu’il effectua sur les opéras de l’auteur de Jenůfa, mais lorsque jeune homme, il fit le voyage de Prague pour étudier auprès de Václav Talich, il hérita de toute une tradition de la direction d’orchestre dont l’objet principal était Dvořák. Continuer la lecture de Par les près et les bois de Bohème